En 2012 Hélène et une poignée de copines perturbent une flash-mob des anti-avortements. 5 ans plus tard, elle risque de retourner au tribunal.
Dur, dur, d’être féministe. Depuis 2012, Hélène, une jeune graphiste de 30 piges, traîne comme un boulet une plainte déposée contre elle par un militant nantais de la Marche Pour la vie. Lors d’une flash-mob organisée par cette asso’ anti-IVG, Hélène lui aurait touché les testicules. Une version que nie la jeune femme et ses proches.
Classée sans suite une première fois, la plainte vient d’être réouverte par le parquet de Nantes. Hélène doit à nouveau s’expliquer sur des faits qui datent de plus de 5 ans :
« Ça a été éprouvant pour nous de subir cette violence. Aujourd’hui, je n’ai plus d’énergie. »
La Story
Le 20 octobre 2012, Hélène est peinarde dans son petit appartement de Nantes quand deux copines l’appellent. « Elles me disent que le collectif En Marche pour la vie [contre l’IVG, ndlr] est en train de tourner un lip dub dans un parc de Nantes. »
Ni une, ni deux, Hélène dessine une affiche sur photoshop, l’imprime en 5 exemplaires pour elle et ses copines féministes avant de se pointer au rassemblement. Elles veulent perturber sans violence l’action du collectif :
« Sur place, il y avait une trentaine de personnes. Les femmes et les enfants dansaient pendant que les mecs les encadraient. On s’est mises à danser entre eux. On voulait juste être visibles à la caméra. »
Le happening ne plait pas franchement aux membres d’En marche pour la vie. « Les mecs se sont jetés sur nous », raconte la jeune femme. L’un d’eux essaie de l’agripper. Grand, costaud, la quarantaine. Hélène le repousse et menace, goguenarde :
« Je lui ai dit : attention, si vous vous approchez de moi, je vais vous piquer votre sperme. »
Quelques minutes plus tard, la police siffle la fin de l’opposition. Les fonctionnaires relèvent l’identité d’Hélène et de ses potes. Fin du round 1.
La femme à la licorne / Crédits : Tomas Statius
Une plainte pour la fille aux lunettes rouges
Quelques mois plus tard, Hélène est convoquée à la Brigade des Mœurs du commissariat de Nantes avec plusieurs de ses amies. « Quand je suis arrivée, la commissaire m’a dit qu’on avait porté plainte contre moi. Le plaignant décrivait une fille avec des lunettes rouges. Et je portais des lunettes rouges », soupire-t-elle devant son café crème.
Elle ne se doute pas encore de ce qui va lui tomber dessus. L’homme qui a porté plainte contre elle s’appelle Pierre Martin. Il l’accuse d’agression sexuelle. « Il a dit que je le lui avais touché les testicules. Et qu’on avait des pancartes avec le slogan “Des Bébés pour les pédophiles” », assure Hélène, désemparée. Quatre amies, présentes le jour des faits, corroborent la version de la jeune femme devant la commissaire.
L’affaire est classée sans suite en avril 2013 mais Hélène ne veut pas en rester là. Deux ans plus tard, elle porte plainte pour diffamation. « La procédure est d’ailleurs toujours en cours. »
Acharnement
Au lendemain de Noël, ce n’est pas un joli cadeau qu’Hélène découvre dans sa boîte aux lettres. Mais une convocation au Tribunal de Grande Instance de Nantes pour le 23 janvier 2017. « Dans la lettre, on m’expliquait que je devais être entendue dans cette affaire en tant que témoin assisté », détaille Hélène. Avant de lâcher :
« Je suis encore un peu choquée. Cette histoire date de 2012. »« Il y a eu un nouveau dépôt de plainte devant le juge d’instruction avec constitution de partie civile. » précise l’avocate d’Hélène, Maître Bouillon. Sauf que la partie civile n’est pas Pierre Martin… mais un certain Jean-Baptiste Darantière, le président d’une asso’ de théâtre catho de la région de Nantes. Sa troupe, les Potimarrants, a la cote à la droite de la droite. Notamment grâce à ses dons à des assos réacs. Ainsi, cette année, les Potimarrants reversent leurs bénefs à la Fondation Lejeune, anti-avortement et anti-euthanasie. Entre temps, le jeune comédien a décidé de ne pas donner suite à sa démarche. Ce qui n’empêche pas la procédure de suivre son cours.
Contacté par StreetPress, ni Pierre Martin, ni Jean-Baptiste Darantière n’ont donné suite à nos appels.