08/01/2017

Le revenu universel va nous sauver des dégâts de l’uberisation

Par Olivier Ertzscheid ,
Par Alice Maruani

Selon Olivier Ertzscheid, la révolution numérique met en péril le salariat tel qu’on l’entend aujourd’hui. Le revenu universel peut permettre de nous en sortir.

La révolution numérique frappe de plein fouet le monde du travail et ça va aller en empirant. C’est ce que l’on appelle un peu rapidement l’Uberisation. Il faut donc inventer de nouveaux modèles de protection sociale, comme le revenu universel. Un salaire à vie donné à tous sans condition de revenus ni de travail.

La robotique va mettre fin au plein emploi

Beaucoup d’économistes le disent : avec l’arrivée l’intelligence artificielle et de la robotique, on ne reviendra jamais à une situation de plein emploi. Le futur de notre société ne va pas être le chômage de masse au sens où on l’entend aujourd’hui, avec d’un côté des gens au chômage et de l’autre du salariat, mais une mise en péril du salariat lui-même. Ce modèle des relations du travail qui a prédominé pendant plus d’un siècle est déjà en recul à l’échelle mondiale.

Connaissez-vous le « Turc mécanique d’Amazon » ? C’est une plateforme en ligne, où il s’agit de faire des petites missions manuelles pour assister les machines, comme de la reconnaissance d’images, et d’être payé à la tâche, sans contrat de travail. C’est assez contre-intuitif, parce qu’avant on pensait que les machines nous libèreraient de ces tâches triviales, et en fait elles en créent aussi. Ce ne sont plus des algorithmes ou des machines qui travaillent « pour nous », c’est nous qui travaillons « pour » des algorithmes et des machines. Cette atomisation du travail, poussée ici à son comble, nous guette tous.

On va assister à une désagrégation des conditions d’employabilité, et dans toutes les professions. Par exemple on va travailler pendant un mois, être au chômage pendant une semaine etc. On va tous devenir intermittents, comme les chauffeurs Uber. Chacun enchaînera des périodes d’activité et d’inactivité plus ou moins longues, plus ou moins bien rémunérées, dans des secteurs d’activités qui pourront être totalement différents.

Avec un gros risque de plonger dans une récession intense, de plus en plus de personnes en difficulté économique qui ne consommeront plus, ne sortiront plus, ne participeront plus à des activités culturelles.

Le revenu universel peut nous sortir de l’impasse

Si on est d’accord avec ce constat, il semble urgent de trouver un autre modèle où les modes de protection sociale ne soient plus uniquement liés à l’activité salariée, comme notre droit au chômage actuel. Le revenu de base ou revenu universel est une de ces possibilités. Certes, pour le moment les types d’activité comme Uber, airBnB, qui créent des phénomènes de fortes tensions, sont marginales. Mais elles vont devenir dominantes. Le politique doit commencer à réfléchir dès maintenant à ces questions, pour les anticiper.

« Il semble urgent de trouver un autre modèle où les modes de protection sociale ne soient plus uniquement liés à l’activité salariée »

Olivier Ertzscheid @affordanceinfo

Malheureusement, elles sont quasiment absentes du champ politique français, qui pense à court-terme. A la primaire de droite, Nathalie Kosciusko-Morizet en a parlé, mais plus pour les start-ups. A gauche, Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon en parlent. Ce n’est déjà plus de la science-fiction, plusieurs pays testent ce genre de dispositifs, et on devrait faire de même. Parce que les mutations vont nous tomber assez vite sur le coin du visage.