13/02/2014

Recruterez-vous le candidat frontiste ?

Municipales : l'entretien de stage de Wallerand de Saint-Just

Par Johan Weisz

Machine à café, pire défaut… Wallerand de Saint-Just est-il vraiment fait pour le job ? Le candidat FN à la mairie de Paris passe son entretien de stage avec StreetPress, dans le cadre d'une émission sur Radio Campus Paris 93.9FM

De ses années au GUD lorsqu’il était étudiant à Assas au redressement des finances du FN en passant par sa participation à l’occupation de Saint-Nicolas de Chardonnet, c’est le profil idéal du stagiaire dynamique et tout entier dévoué à la cause qui nous est ressorti du CV de Wallerand de Saint-Just, tête de liste Front National/Rassemblement Bleu Marine pour les municipales à Paris. Convoqué pour un entretien, c’est avec entrain qu’il a évoqué sa dernière « Nuit Blanche » alcoolisée, les « us et coutumes » de certaines populations de banlieues qui feraient baisser la valeur de l’immobilier dans ces quartiers, ou encore sa volonté, une fois préposé à la machine à café, de « réveiller » les élus. Un mordu de travail, qui bien qu’émargeant à 100.000 euros net par an, estime n’avoir « jamais bien gagné [sa] vie»…

Entretien de stage Machine à café, pire défaut… Wallerand de Saint-Just est-elle vraiment fait pour le job ? Le candidat par ailleurs trésorier du Front National répond à StreetPress.

Bonjour monsieur, je vous serre la main, bienvenue !

Merci beaucoup de me recevoir…

Je vois que vous avez une belle cravate… Pas comme l’écolo de la semaine dernière qui n’avait pas de cravate

Ils le font exprès, peut-être…

Asseyez-vous. Alors, dites-moi, vous postulez pour un stage à la mairie de Paris, stage de 6 ans, non rémunéré…. Vous remplacerez l’ancien stagiaire qui part à la retraite. Mais dites-moi, un stage non rémunéré… ça ne vous pose pas de problème ?

Si, parce que j’ai besoin de nourrir ma famille, et si je ne peux plus exercer mon métier – parce que je crois que quand on est maire de Paris on ne peut pas faire deux choses en même temps – à ce moment-là…

Parce que moi je croyais que vous faisiez ça pour la gloire, et puis c’est vrai qu’à la mairie de Paris on en a pas mal des stagiaires non rémunérés…

Oui, enfin je dirai ça à ma famille, on verra…

Bon, attendez que je retrouve votre CV… Vous me rappelez votre nom ?

De Saint-Just

Ah ! C’est aristo, ça, non ?

Oh… oui, oui, enfin c’est ce qu’on appelle des hobereaux : mon père était agriculteur, tout le monde a toujours été agriculteur dans ma famille, et on est originaires de l’Artois et de la Picardie.

Saint-Just, Saint-Just, attendez que je retrouve votre CV… Wallerand… C’est original comme prénom, ça vient d’où ?

C’est un nom de famille, aussi, dans le nord de la France. Vous voulez vraiment que je vous dise d’où ça vient ? C’est la germanisation du prénom latin Galeranus. Comme Guillaume qui a donné Wilhem, le « g » latin donne le « w » allemand, flamand ou wallon. Et c’est comme ça que Galeranus a donné Wallerand. Et le Galeranus, le saint Galeranus, a fondé l’abbaye bénédictine d’Ourscamp, à côté de Noyon.

Donc c’est un nom d’origine allemande ?

Non, latine…

Ah, oui, latine. J’ai cinq minutes à vous accorder, donc on va quand même aller vite… Quel est votre pire défaut, monsieur de Saint-Just ?

La paresse.

Eh, bien ! Vous postulez à un entretien de stage, et vous me dites : la paresse !

Oui, c’est cela. Mais je compense ma paresse par ma franchise.

Et concernant le café à la machine, ça va, vous gérez ? Café long, café court, sucré, serré… Il faudra en faire pour les élus, quand même, faut assurer !

Oui, oui oui oui, il faut les réveiller, les maintenir réveillés. Parce qu’à partir de 3 heures de l’après-midi, avec la digestion…

Vous ne buvez pas de café ?

Non, je ne bois pas de café.

Mais qu’est-ce que vous buvez, du coup ?

Je bois du thé… et de l’alcool.

De quel genre ?

Du whisky, et du vin rouge.

Alors, je reprends votre CV : fac d’Assas, avocat, conseiller municipal, conseiller régional, tiens, trésorier du Front National depuis 2005… Moi je l’aurai pas mis sur le CV, parce qu’il y a beaucoup de dettes, au FN…

Non il n’y en a plus. Toute mon activité de trésorier à été de réduire la dette, et maintenant, on n’en a plus. On n’est pas riches, mais on n’a plus de dettes. L’UMP a 40 millions d’euros de dettes, enfin, de pertes par an. Eux ils sont très mal partis…

Toujours sur votre CV, étudiant à Assas vous vous engagez au GUD ; en 1977 vous participez à l’occupation de Saint-Nicolas du Chardonnet ; vous adhérez au Front National en 1987, l’année ou Jean-Marie le Pen explique que « les chambres à gaz sont un point de détail de l’histoire de la seconde guerre mondiale »… Alors, dans votre lettre de motivation vous écrivez que vous n’êtes pas d’extrême-droite… Je ne comprends pas, à quel moment avez-vous arrêté d’être d’extrême-droite ?

Je compense ma paresse par ma franchise

Toute mon activité de trésorier à été de réduire la dette, et maintenant, on n’en a plus

Je crois que je n’ai jamais été d’extrême-droite au sens de la caricature, si vous voulez. On vous dit, Anton (sic) Breivik est d’extrême-droite, je ne sais quel nazillon ou criminel est d’extrême-droite, et vous aussi vous êtes d’extrême-droite. Alors, c’est pas sympa, on n’accepte pas, ce sont des étiquettes tout ça. Ce sont les journalistes qui veulent toujours mettre les responsables politiques dans des cases et dans des étiquettes.

Si on prend le GUD en 1969-69, est-ce qu’il y avait des gens plus à droites qu’Alain Robert – le fondateur du GUD, à l’époque ?

Je ne peux pas vous dire, je ne sais pas… Moi, je vais vous dire, je ne sais pas si je suis de droite ou d’extrême-droite, mais je ne suis pas de gauche. Je ne suis pas socialiste.

Parlons un peu du job pour lequel vous postulez. Comme je vous le disais, j’ai bien reçu votre lettre de motivation … Vous me parlez de « mission ambitieuse »… de « tache exaltante »… Ah tiens, je vois que vous parlez de « pérenniser la nuit blanche ». Mais vous y avez déjà été, franchement, pour écrire ça ?

Oui, pourquoi ?

Et bien, c’est de « l’art dégénéré auquel personne ne comprend rien », « on y fait plus la queue en une nuit que toute l’année à Eurodisney »…

Ça dépend d’où vous allez, je ne sais pas combien la Nuit Blanche compte de lieux à Paris, mais on peut quand même en choisir quelques-uns…

Vous vous souvenez de votre dernière Nuit Blanche ?

Non, je ne m’en souviens pas, parce qu’elle devait être très alcoolisée !

Mais à moins d’être vraiment alcoolisé, on se souvient des queues que l’on fait…

Oui, oui, mais bon… C’est la nuit, à 4 heures du matin, être dehors dans Paris, bon bah voilà, c’est une raison.

Je ne m’en souviens pas, parce qu’elle devait être très alcoolisée !

Parlons un peu de votre équipe : vous avez l’esprit d’équipe, monsieur Wallerand ?

J’essaie, et c’est peut-être eux qui ne l’ont pas assez.

Dans votre lettre de motivation vous voulez défendre « les gens qui souffrent… les nouveaux pauvres » Mais vos têtes de liste… attendez, je regarde… deux énarques, dont un écrivain essayiste, vous, vous êtes un avocat très couru, qui gagne 100.000 euros net par an, le candidat FN dans le 4e est un avocat international qui fait des soirées avec Massimo Gargia, et dans le 3e c’est un ancien candidat de télé-réalité…

J’ai surtout deux normaliens, agrégés de lettres, sur ma liste.

Mais c’est pas un peu bling bling tout ca ?

Pas du tout, mais pas du tout ! Ce qui m’attriste c’est que vous pensiez qu’un normalien ou un énarque ne peut pas, en priorité, s’occuper des pauvres et des plus défavorisés.

Donc la liste n’est pas bling-bling ?

Non, pas du tout, au contraire, elle est surtout extrêmement sérieuse.

Le service RH m’a demandé rapidement de vous poser une question sur vos hobbies… Mais il y a les JO de Sotchi… Et en 2018 à Paris il y aura les Paris Gay Games, c’est les JO des LGBT. Vous en pensez quoi ?

Je trouve que c’est vraiment l’expression du communautarisme presque le plus ridicule et je voudrais bien savoir qu’est-ce qu’il faudra faire pour pouvoir concourir.

Merci d’être venu nous voir, c’était très gentil, on vous recontactera. Vous pouvez retourner voir Charles-Henri dans son bureau.