Novembre 2010. Émilie quitte son boulot nantais et débarque en Bretagne pour suivre son compagnon, Mathieu, fraîchement embauché dans une grande entreprise. Depuis, aucun emploi concret à se mettre sous la dent. Quelques heures par-ci, par-là, mais rien de sûr. Le moral, lui, reste au beau fixe : des challenges sportifs offerts par la Wii aux heures passées sur Internet à écumer les sites d’annonces, Émilie a accepté de raconter son parcours et son quotidien à StreetPress.
ASV (Age, sexe, ville, souvenir de Caramail) 27 ans, femme, Larmor-Plage (à côté de Lorient, dans le Morbihan). Je cherche un job depuis novembre 2010, depuis… un an et demi en fait. Quand je suis arrivée en Bretagne, j’ai d’abord fait des bilans de compétence. J’avais centré toutes mes études, du BEP au BTS, sur la vente, et je sentais que ce métier ne me correspondait plus du tout.
Je me suis dit, pourquoi ne pas être assistante maternelle ? J’ai voulu monter ma propre entreprise de services à la personne, j’ai même suivi une formation pour. Mais finalement, je pense tenter un CAP petite enfance à la rentrée prochaine. Mais en alternance, hein, parce que je m’imagine pas une seconde être en cours 5 jours sur 7 ! Pas à mon âge !
En attendant, je bosse un peu où je peux. Là, je vais mettre sous pli les programmes des candidats à la présidentielle. C’est drôle, je n’ai jamais été aussi contente qu’il y ait une élection !
div(border). Le jeune chômeur de la semaine
Chaque semaine, pendant la campagne, StreetPress vous présente « le jeune chômeur of the week ». Le chiffre, vous le connaissez par cœur : 22,4 pour cent des jeunes sont sans emploi en France. Mais au-delà des statistiques que se renvoient politiques et journalistes, StreetPress vous présente de vrais « jeunes chômeurs », loin des clichés et des débats de la présidentielle. Parce que la recherche d’emploi ne se passe pas qu’à Pôle Emploi et que même si on est un « jeune chômeur », on a aussi une vie !
Ton activité la plus récurrente Chercher du boulot ! Bon, j’avoue, ça ne me prend pas non plus toute ma journée… Généralement, je me pose deux bonnes heures après le déjeuner, je regarde les annonces du Pôle emploi, je fouille sur les sites qui recensent toutes les offres, et parfois je vais sur le bon coin. Oui, comme l’inscription sur le site est gratuite, certains y postent des annonces – par contre, t’attends pas à trouver des trucs où t’es payée plus que le minimum du minimum syndical…
Le reste du temps, j’essaie de me lever assez tôt, de faire un peu de sport, deux ou trois fois par semaine. Toujours le matin, et souvent en m’entraînant sur la Wii. Ris pas, c’est physique ! Et puis sinon, je fais les courses, la cuisine (seulement le midi, le soir, c’est mon ami), le ménage… ça me vide la tête. On va aussi souvent se balader avec ma voisine, s’aérer l’esprit. Heureusement qu’elle est là… J’aurais craqué, sinon.
Ris pas, c’est physique la Wii !
A quoi t’as renoncé ? A mes séances de shopping, à un forfait téléphonique digne de ce nom… Je vais beaucoup moins chez le coiffeur, aussi – bon, je m’accorde quand même une coupe tous les trois mois, si j’ai un entretien, j’ai pas non plus envie de ressembler à une harpie !
Quand t’es au chômage, il suffit que t’aies un petit souci et t’es tout de suite à court d’argent : regarde, ma voiture a lâché et ici, impossible de faire quoi que ce soit sans. Imagine les frais pour en racheter une ! Déjà que l’assurance est super chère… ça a complètement explosé notre budget et on partira pas en vacances cet été. C’est bête mais sur un mois, 100 € de plus ou de moins, je le sens tout de suite. Parfois, c’est tellement frustrant que t’as envie de prendre le premier boulot qui vient, même s’il est nul et que t’es payée trois fois moins que le Smic.
Émilie, speed CV
27 ans, Morbihan, permis B
Etudes : Bep, Bac Pro et BTS Vente
Expérience pro : vendeuse conseil pendant 5 ans
Poste recherché : Garde d’enfants à domicile et aide-ménagère
Loisirs : sport, sorties
Le job le plus débile proposé par Pôle Emploi ? Aucun. Parce qu’ils ne me proposent absolument rien ! Déjà, ils ont mis un an à comprendre que j’avais déménagé – mon dossier était toujours à Nantes ! Personne ne m’a aidé, à une ou deux exceptions près. Sincèrement, y’a intérêt à être préparé psychologiquement.
Je me rappelle, le jour de mon premier entretien au Pôle Emploi, ça faisait peut-être deux semaines que j’étais arrivée en Bretagne, et le conseiller commence à m’agresser verbalement, me dire que vouloir devenir assistante maternelle (comme ma mère), c’est sans issue, que c’est un « sale métier ». Hyper constructif. J’avais envie de le gifler.
Pareil, quand j’ai voulu créer ma boîte (de services à la personne), je leur ai demandé de m’inscrire à des formations pour savoir repasser ou laver les vitres à la perfection. Si j’avais uniquement compté sur eux, j’attendrais toujours.
Au début, j’étais paniquée, je ne connaissais personne
Ce que le chômage a changé en toi ? C’est dur à dire parce qu’avec le temps, être au chômage est un peu une habitude. Même si j’essaie de tout faire pour que la situation change.
Au début, j’étais paniquée, je ne connaissais personne dans la région, mes amis étaient loin, je le vivais mal. Je regardais l’heure en permanence, je me disais : « Il est 18h, plus qu’une demi-heure avant que mon copain rentre. » Quand tu commences à te dire ça, c’est que t’es un peu déprimée ! Y’a des (très) longues journées, des moments où je suis anéantie. Mais j’ai la chance d’être bien entourée, mon ami m’aide beaucoup, j’ai pas envie de me laisser faire.
ô mon Dieu, j’ai un trou dans mon CV qui grandit un peu plus chaque jour, comment je vais faire ?
Son conseil ? Ne pas attendre que le Pôle emploi t’aide. T’es tout seul ! Une fois que tu le sais, je trouve ça plus simple de s’organiser. Et puis ne pas passer ta journée sur un ordi. Ça peut vite devenir angoissant de chercher en non-stop, te dire « ô mon Dieu, j’ai un trou dans mon CV qui grandit un peu plus chaque jour, comment je vais faire ? » Moi, j’essaie de me fixer des objectifs. Surtout, de toujours rebondir et le plus vite possible.
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