Mise à jour. Ce lundi 7 mars, à 6h30, une grosse centaine de CRS est venue cueillir les réfugiés installés sous le métro aérien de Stalingrad. eComme d’habitude personne n’a été prévenu », soupire Houssam, un bénévole présent sur place ce matin. Selon lui, plus de 200 réfugiés ont été emmené vers des centres d’hébergement ou des hôtels sociaux installés dans toute l’Île-de-France. 50 autres seraient restés sur le carreau.
« C’était la 25e expulsion depuis le 2 juin dernier, si l’on compte même celles sans plans d’hébergement », précise Houssam. Il est toujours impressionné par les moyens mis en place :
« Ce matin c’était une évacuation policière, il n’y avait pas de personnes de l’OFPRA [Office Français de protection des réfugiés et apatrides, ndlr.]. Ils ont quadrillé tout le quartier de La Chapelle à Jaurès. »
Comme d’hab, selon l’homme à la casquette militaire kaki, les flics n’auraient pas fait dans la dentelle :
« Je me suis même mangé un coup de matraque parce que je protestais contre la manière dont ils traitaient une mère enceinte »
Stalingrad, sous le métro aérien (19e) — « Il faut qu’on tienne ce soir. Cela fait longtemps qu’on n’a pas réussi à monter un camp comme ça. » Sous le métro Stalingrad, Karim sautille, frotte ses mains l’une contre l’autre avant de les enfourner dans les poches de sa parka. Il est 10h30 ce jeudi 3 mars et ce membre du collectif La Chapelle Debout a passé la nuit dehors en compagnie des migrants. La veille, une trentaine de réfugiés a posé cartons et couvertures sur ce bout de trottoir.
Et ce matin, le froid les glace jusqu’aux os. « Les dernières nuits, les flics nous suivaient. Ils empêchaient les réfugiés de se poser », raconte Karim. Au terme d’une de ces parties de cache-cache nocturne, cet habitant de Barbès avait même fini par mettre les réfugiés à l’abri dans un parking du 18e :
« Je leur ai d’abord demandé si ça leur allait. Et ils se sont installés. Ils ont au moins pu dormir »
Un point de fixation
Deux jours après l’installation du camp, une grosse centaine de réfugiés dort là. Leur objectif ? Tenir suffisamment longtemps pour forcer la main à la mairie et obtenir des places en hébergement d’urgence.
Leur objectif ? Tenir suffisamment longtemps pour forcer la main à la mairie et obtenir des places en hébergement d’urgence. / Crédits : Tomas Statius
Pour l’instant même si rien ne protège les réfugiés des bourrasques qui s’engouffrent sous le métro, le camp s’organise. Les soutiens affluent. Ils apportent chaussettes, nourritures et médicaments à ceux qui en ont besoin. Sur le bas-côté, plusieurs camionnettes de CRS stationnent en permanence. « Si vous installez une tente, on la confisquera », tente d’expliquer cet officier aux réfugiés.
Shakir, réfugié et SDF
Petite doudoune sur le dos, chaussures en cuir bien vernies, Shakir n’a pas franchement l’air de sortir de son sac de couchage quand on le rencontre au camp de Stalingrad. Pourtant ce jeune Afghan de 25 piges a passé la nuit dehors. Shakir est coutumier du fait : depuis son arrivée en Europe en 2011, l’ex-banquier galère de foyers d’accueil d’urgence en squats de sans pap’ sans parvenir à se poser. Après avoir tenté sa chance à Bruges pendant 2 ans, il est depuis quelques mois de retour à Paname :
« Là-bas j’avais une copine, je travaillais dans un resto mais je n’ai pas obtenu de papiers »
Si niveau asile, Shakir est plutôt verni — il vient d’obtenir le statut de réfugié – il est toujours à la rue. Sans job, ni réelle perspective : « Les associations n’ont pas de logements pour moi ». Entre deux bouffées de cigarettes, il demande naïvement :
« Ici, comment on fait pour avoir un appartement ? »
« Calais, c’est fini »
Alors que la partie sud de la jungle de Calais est toujours en train d’être démantelée, les bénévoles attendent un afflux de migrants en provenance du nord de France. « 200 à 300 devraient arriver d’ici la fin de la semaine », assure l’un d’eux à StreetPress. Il tient ses infos de potes présents dans le bidonville.
Ils sont plus d'une centaine à passer la nuit sous le métro. / Crédits : Tomas Statius
Abdou, lui, a quitté la jungle depuis 1 mois déjà. Le smile aux lèvres, ce jeune Soudanais originaire du Darfour détaille les raisons de son départ :
« Calais c’est fini. Là-bas, la police te met des coups de matraque. Ici ça n’est pas comme ça »
La veille Abdou et ses potes ont quand même eu droit à une visite de courtoisie de la maréchaussée. Mais ce n’est pas ça qui va l’arrêter :
« Avec mes amis, ça fait un mois qu’on dort dans le quartier. On ne bougera pas. »
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