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    17/11/2010

    « Connaissez-vous la différence entre négationniste et révisionniste, cher ami ? »

    A la « Fête des Patriotes », Bruno Gollnisch rend hommage à Pétain

    Par La Rédac'

    Facho vintage ? Dans la course à la présidence du Front National qui l'oppose à Marine le Pen, Bruno Gollnisch veut rassembler le noyau dur historique du FN. Ambiance, à la « Fête des Patriotes » organisée le week-end dernier à Villepreux (78).

    Villepreux (78). 13 novembre. Des Skinheads en bombers Londsdale  et Doc Martens  reprennent en choeur le chant des Cosaques  avec un troubadour déguisé en Chouan et un prêtre en soutane. La scène peut mettre mal à l’aise mais pas ici à Villepreux (78) où Bruno Gollnisch organisait un grand raout francilien avant le congrès du Front National le 16 janvier à Tours, qui doit désigner le successeur de Jean-Marie Le Pen.

    MAP Villepreux

    Depuis le mois d’octobre, les attaques entre les deux prétendants au trône – Bruno Gollnisch et Marine Le Pen – se multiplient par médias interposés. Quand l’un reproche à l’autre de ne « s’intéresser qu’à la dé-ringardisation du parti », l’équipe de Marine Le Pen qualifie Bruno Gollnisch « d’homme de la IVème République, peu adapté au XXIème siècle » (lire ici )

    Au Domaine de Grand’ Maisons , Bruno Gollnisch tient à montrer à la presse qu’il vit à la même époque que Justin Timberlake : il adore jouer à la bataille navale avec son petit-fils sur son iPhone et possède même un iPad. Ça ne l’empêche pas d’invoquer Pétain devant des sympathisants amateurs de reconstitutions historiques – dont certains ont été compagnons de route de miliciens chrétiens pendant la guerre du Liban.

    StreetPress n’a pas eu besoin d’une Delorean pour rendre visite à une extrême-droite très vintage mais a fait l’aller-retour Paris-Villepreux en Opel Corsa.

    Une « Fête des Patriotes » chez des royalistes

    Villepreux : depuis Paris prenez l’A13 jusqu’à Saint-Nom-la-Bretèche avant de tourner par la D98. La ville est coincée entre Versailles la catholique et Saint-Cyr la militaire. « Vous êtes ici dans une ferme, prévient un militant qui monte la garde devant le Cathéor de Grand’ Maisons perdu dans les champs. Recevoir dans une ferme, cela nous rattache à la terre et donc tout à fait à la Patrie ! »

    La ferme de Grand’ Maisons et ses 2.000m² accueillent 700 sympathisants frontistes (1.000 selon Gollnisch) à l’occasion de « La Fête des Patriotes ». Gentiment prêté au député européen FN par Luc de Saint-Seine – « un aristocrate irréprochable » aux dires d’un militant – le domaine sert habituellement de décor à des reconstitutions historiques pour les descendants du Comte de Saint-Seine où se côtoient « chariots hippomobiles » et Grognards de l’Empire .

    Dans l’assistance, quelques vieilles dames aux traits tirés exhibent des sacs à fleur de Lys, d’autres sont déguisés en Chouans ou en Vendéens : ils sont en territoire conquis même si la ferme ne fait plus partie du domaine royal de Versailles depuis 1793.

    Entre nostalgie de Vichy et vannes négationnistes

    Aujourd’hui pas de chasse à courre ni de hussards pour monter la garde. Les thèmes de la soirée sont résolument plus modernes : la Deuxième Guerre mondiale et la décolonisation. Au programme de la journée, la projection des films la 317ème compagnie – sur les atrocités subies par les troupes françaises en Indochine – et Katyn – sur le massacre de 22.000 Polonais par les Soviétiques. « Vous savez combien il y eu de morts dans les camps soviétiques ? 100 millions ! », s’énerve un militant.

    Les plus vieux fanfaronnent dans la cour de la ferme : « moi le Maréchal me plaisait bien à l’époque », tandis qu’un skinhead interpelle un homme à moustache : « Il n’est pas venu le négationniste autrichien ? » Un papy à veston se retourne vers le crâne chauve qu’il prend pour un inculte :

    « Connaissez-vous la différence entre négationniste et révisionniste, cher ami ? »

    « Gollnisch, il est plus dur sur la doctrine »


    Vidéo « Je crois être un homme tout à fait moderne ! »

    Quand on lui demande quels sont ses atouts, Gollnisch affirme avoir « plus d’épaisseur dans les convictions que Marine Le Pen » à qui il reproche de « courir après la dédiabolisation ». CQFD : dans son discours de clôture, il prend la défense du Maréchal Pétain devant quelques 700 militants attablés. « Ce dont je suis sûr en tout cas, c’est que les dirigeants actuels sont 100 fois plus coupables, si tant est qu’il l’ait été, que le maréchal Pétain », rapporte le blog Droites Extrêmes . Puis il apporte son soutien à Vincent Reynouard  négationniste notoire condamné à un an de prison ferme.

    Les militants adorent : « Gollnisch, il est plus dur sur la doctrine. C’est évident, il faut voter pour lui ! », s’emballe un jeune skin du service de sécurité pour convaincre un nouvel encarté FN hésitant. Une tablée de crânes rasés – avec écrit « Jeunes avec Gollnisch » sur leur T-shirt – éructent des « Gollnisch Président ». Les bouteilles de vin rouge à l’effigie de candidat se vident dans l’euphorie collective du « banquet patriote ».  

    Bruno Gollnisch dans ton Iphone

    Pétain, le négationnisme, des supporters déguisés en Chouans, une messe avant le repas : et si Dominique Martin, le chargé de campagne de Marine le Pen, avait raison quand il affirme que Gollnsich « ne s’est pas adapté au XXIe siècle ? »

    « J’ai un application iPhone Gollnisch téléchargeable sur iTunes » (sic), objecte l’homme au pin’s à flamme [Note de la rédaction : Bruno, bravo pour ton appli iPhone, mais une appli ça se télécharge sur… l’ App Store et pas sur iTunes ]. Puis il nous fait une petite démonstration sur son smartphone : « L’application bataille navale à laquelle je joue avec mon petit-fils est absolument formidable. Et j’ai tous mes dictionnaires japonais ! » D’ailleurs son discours de ce soir, il le fait en répondant à « 50 questions postées sur [son] Blog ». Gollnisch est bien rentré dans l’ère 2.0 mais met quand même un bémol :

    « Il n’y a de véritable modernité qu’enracinée dans la tradition. »

    Un accueil très IIIe Reich pour les journalistes

    Car même s’il est sur Twitter et Facebook, la com’ de Bruno Gollnisch est aussi vintage qu’ un clip de campagne de Bruno Mégret . En témoigne son retard sur Marine le Pen avec seulement 134 followers sur la plateforme de micro-blogging (contre 502) et 1.026 fans sur le réseau social (contre 4.200).

    L’équipe de Bruno Gollnisch a une façon bien à elle de communiquer. Lors du « banquet patriote », les journalistes ont eu l’honneur d’être installés à une table aisément identifiable par une banderole « table preSSe ».

    Plus tôt dans la soirée, un sexagénaire visiblement éméché s’en était pris à un journaliste de StreetPress : « Nous fait pas chier avec tes questions, j’ai mes 15 mecs qui peuvent te tomber dessus » avant d’essayer de lui botter les fesses quelques instants plus tard à coup de bottines : « Virez-moi ces deux connards ! » Les 10 minutes suivantes, nous les passerons avec 2 skins sur les talons et la nuque chatouillée par leur respiration. Info ou intox, un militant FN nous apprendra que le sexagénaire belliqueux « était un compagnon de route de Zanettacci , un Français qui s’était engagé avec les milices chrétiennes au Liban. »

    Gollnisch vise « les adhérents », qui votent

    Pendant que Gollnisch réunissait ses partisans au fin fond des Yvelines, sa concurrente Marine Le Pen organisait un meeting le lendemain au Back-Up , une boîte de nuit parisienne. Sans skinheads et avec toute la presse nationale. La stratégie de l’entre-soi l’emportera t-elle sur celle de la dédiabolisation ? Bruno Gollnisch aime à rappeler que « ce ne sont pas les sympathisants qui votent, mais les adhérents. » Réponse le 16 janvier à Tours.

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